bienvenue dans l’atelier
regarder les traces des avions dans le ciel, lignes parallèles ou qui divergent, être renvoyé à son immobilité derrière la vitre du bureau, rêver de voyages, penser à des écritures ou des dessins, savoir la désagrégation progressive de ces lignes nettes qui bientôt s’étalent informes puis disparaissent, penser le ciel est une ardoise magique, comme celles qu’on[...]
assis sur le siège passager, rouler la nuit sur l’autoroute, emporté de temps en temps par le sommeil, flashs d’une minute d’après l’horloge, ouvrir les yeux sur l’espace éclairé par les phares, structuré de lignes blanches, tout paraît soudain si net que ressentir un apaisement, parce que la solitude, le dessin lisible sans effort du monde autour, avoir[...]
s’interrompre dans son travail parce que le téléphone sonne, descendre au rez-de-chaussée, avec appréhension, voire pointe d’angoisse — parce que laisser sonner si aucune incertitude ou inquiétude quant aux proches, mais c’est devenu si rare — décrocher et subir un temps de silence ou de brouhaha — le second est préférable, il n’est gros de rien — puis la voix qui[...]
parcourir une rue récurrente dans tes rêves, à la pente raide — ta ville natale est constituée d’un plateau, puis des coteaux qui dégringolent jusqu’à la rivière qui passe au milieu
ne pas se souvenir d’un rêve, n’en garder qu’une impression vague, savoir qu’il irradie l’humeur du jour, colore celui-ci, en attraper moins qu’une image, penser à la Recherche, se résoudre à ce qu’ici, effort et volonté n’auront pas prise, s’inquiéter de ce qui se dérobe, de ce qu’il y avait là et qu’on ignorera sans doute à jamais, de ce qu’on aurait pu saisir,[...]
apercevoir sur le trottoir, posé en évidence sur le dessus d’une poubelle, un carton avec dedans deux poupées à grosses tàªtes rondes
regarder avec son fils, dans le sous-sol de la maison natale, un dessin fait par son grand-père, au même âge que lui à peu près, quand adolescent il prenait des cours avec le vague projet, ou le désir réprimé, ou impossible — on sait si peu parfois de ceux qui vous ont transmis la vie —, en tout cas jamais réalisé, de devenir dessinateur industriel, identifier[...]
croiser au supermarché une connaissance perdue de vue depuis des années, croisée dans ce même lieu de temps à autre, croire qu’on s’en tirera d’un bonjour lointain, protégé par la file d’attente à la caisse, que suffiront le prénom retrouvé et un signe de la main, comprendre qu’on vous attend, chariot enfin vidé sur le tapis s’avancer, s’embrasser et faire le décompte[...]
Boire un café, pendant ces heures de trou dans la salle des profs, et que pas l’énergie nécessaire pour grand chose, fatigue accumulée au fil des semaines, comme en ce moment, se rendre à la machine, s’amuser de l’idée que les mêmes sur les aires d’autoroute, rêver de départ, de voyage, aller s’asseoir dans un fauteuil, vacant et certain que rien à venir, immobile,[...]
apercevoir, en quittant le travail, ou depuis l’une des fenêtres du lycée, l’employé municipal et son gilet fluo, circulant tant bien que mal entre les élèves amassés là , contournant les épaules, de tout son corps s’excusant d’être là , un sac plastique transparent d’une main, de l’autre attrapant avec une pince à long manche canettes, bouteilles, paquets de chips,[...]