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traversée Balzac

Béatrix (deuxième et dernière partie)

Où il est question de voyage de noces :
N’est-il pas au moins surprenant que les artisans de la Suisse et de l’Allemagne, que les grandes familles de France et d’Angleterre obéissent au màªme usage et se mettent en voyage après la cérémonie nuptiale ? Les grands se tassent dans une boîte qui roule. Les petits s’en vont gaiement par les chemins, s’arràªtant dans les bois, banquetant à toutes les auberges, tant que dure leur joie ou plutà´t leur argent. Le moraliste serait fort embarrassé de décider où se trouve la plus belle qualité de pudeur, dans celle qui se cache au public en inaugurant le foyer et la couche domestique comme font les bourgeois, ou dans celle qui se cache à la famille en se publiant au grand jour des chemins, à la face des inconnus ?

Où Balzac aime à établir des points de comparaison entre ses récits :
Cette finesse innée, ces dons de race rendront peut-àªtre cette jeune femme aussi intéressante que l’héroà¯ne des Mémoires de deux jeunes mariées
... et renvoie à son œuvre : (Voir Une esquisse d’après nature, Scènes de la Vie Parisienne.) (Voir Splendeurs et Misères des courtisanes).
... parfois pour gagner du temps :
Charles-à‰douard, comte Rusticoli de La Palférine, le héros de la Scène intitulée Un Prince de la Bohàªme (voir les Scènes de la vie Parisienne), ce qui dispense de faire ici son portrait et de peindre son caractère.
... et mieux brouiller les les limites du réel et de la fiction :
lorsque vous rencontrerez La Palférine ou quand vous arriverez au Prince de la Bohàªme dans la troisième Livre de cette longue histoire de nos mœurs

Où Balzac utilise l’italique pour le mot gars, marque du parler de l’ouest

Où les romans de Walter Scott incarnent un temps révolu (sauf en Bretagne) :
Et ce fier Calyste, qui jouait son rà´le de seigneur comme un personnage de Walter Scott. Monsieur recevait les hommages comme s’il se trouvait en plein treizième siècle.

Où rien ne vaut l’enclavement pour éviter la propagation des idées :
Ah ! la noble et sublime Bretagne, quel pays de croyance et de religion ! Mais le progrès la guette, on y fait des ponts, des routes ; les idées viendront, et adieu le sublime.

Où Balzac injecte de nouveau une figure de conte dans son récit :
Enfant ! les Touches sont pour toi le cabinet de Barbe-Bleue, car il n’y a rien de plus dangereux que de réveille rune passion qui dort.

Nous autres femmes, qui sommes encore un peu jeunes filles, il suffit qu’on nous dise : « Voici une clef tachée de sang, au milieu de toutes celles de votre palais, entrez partout, jouissez de tout, mais gardez-vous d’aller aux Touches ! » pour que nous entrions là , les pieds chauds, les yeux allumés de la curiosité d’àˆve.

Où on croise sur la Loire un bateau à vapeur :
Décidément, un bateau à vapeur ne vaut pas une voiture. Le voyage en public est une invention de monstre moderne, le Monopole.

Où Balzac revendique d’écrire une histoire des mœurs franà§aises au XIXe siècle

Où pas de vérité sans miroir :
Au milieu du salon qui précédait la chambre à coucher, elle vit dans une glace la figure de Calyste qui, ne se sachant pas observé, laissait paraître sa fatigue et ses vrais sentiments en ne souriant plus.

Où Balzac place haut la musique :
La musique est souvent plus puissante que le poà« te et que l’acteur, les deux plus formidables natures réunies.

Où le piment fait irruption dans la cuisine via l’Angleterre (l’huilier anglais et ses flacons ardents :
Ah ! s’écria Sabine le lendemain en s’éveillant, Calyste voulait de ces hannetons pilés, de ces ingrédients anglais qui se servent dans des pharmacies en forme d’huiliers ; madame de Rochefide l’accoutume à toutes sortes de piments !

Où il est question des lorettes (et où Balzac témoigne de sa volonté de dire la diversité des destins) :
ce monde si dangereux a déjà fait irruption dans cette histoire des mœurs par les figures typiques de Florine et de l’illustre Malaga d’Une Fille d’àˆve et de La Fausse Maîtresse ; mais, pour le peindre avec fidélité, l’historien doit proportionner le nombre de ces personnages à la diversité des dénoà »ments de leurs singulières existences qui se terminent par l ?indigence sous sa plus hideuse forme, par des morts prématurées, par l’aisance, par d’heureux mariages, et quelquefois par l’opulence.

... et où Balzac dresse à leur sujet le plan d’un Paris émergent :
Sans les Aspasies du quartier Notre-Dame-de-Lorette, il ne se bà¢tirait pas tant de maisons à Paris. Pionniers des plà¢tres neufs, elles vont remorquées par la Spéculation le long des collines de Montmartre, plantant les piquets de leurs tentes, soit dit sans mauvais jeu de mots, dans ces solitudes de moellons sculptés qui meublent les rues européennes d’Amsterdam, de Mila, de Stockholm, de Londres, de Moscou, steppes architecturales où le vent fait mugir d’innombrables écriteaux qui en accusent le vide par ces mots : Appartements à louer ! La situation de ces dames se détermine par celle qu’elles prennent dans ces quartiers apocryphes ; si leur maison se rapproche de la ligne tracée par la rue de Provence, la femme a des rentes, son budget est prospère ; mais cette s’élève-t-elle vers al ligne des boulevards extérieurs, remonte-t-elle vers la ville affreuse de Batignolles, elle est sans ressources.

Où Balzac aime à cogner sur de petits jeunes gens ravissants, des artistes, des gens de lettres nouveau-nés à la gloire qui niaient les anciens et les modernes et tà¢chaient de se faire une grande réputation en faisant peu de chose.
il publia dans le Journal des Débats une nouvelle qui lui valut en quelques jours une réputation comme les auteurs de profession ne l’obtiennent pas après plusieurs années de travaux et de succès, car il n’y a rien de violent à Paris comme ce qui doit àªtre éphémère.

Où est jeté un autre regard sur l’Arnolphe de Molière :
L’on croit qu’Othello, que son cadet Orosmane, que Saint-Preux, que René, Werther et autres amoureux en possession de la renommée, représentent l’amour ! Jamais leurs pères à cœur de verglas n’ont connu ce qu’est un amour absolu, Molière seul s’en est douté. (...) L’amour, c’est se dire : « Celle que j’aime est une infà¢me, elle me trompe, elle me trompera, c’est une rouée, elle sent toutes les fritures de l’enfer... » Et d’y courir, et d’y trouver le bleu de l’éther, les fleurs du paradis. Voilà comme aimait Molière, voilà comme nous aimons, nous autres mauvais sujets ; car, moi, je pleure à la grande scène d’Arnolphe !...

Où revient cette image récurrente pour décrire la fin de soirée :
Maxime et Madame Schontz rentrèrent dans le salon les premiers, vers dix heures, en laissant les convives qui ne gazaient plus les anecdotes et qui se vantaient leurs qualités en collant leurs lèvres visqueuses au bord des petits verres sans pouvoir les vider.

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