De tous les romans que nous livrent cette nouvelle rentrée littéraire, Le corridor des mirages de Philippe Desjardins est à coup sà »r le seul qui parvienne à entraîner son lecteur aussi loin dans les arcanes de l՚à¢me humaine. Réfutant d՚emblée, dans une courte préface aux accents de manifeste, l՚étiquette désormais tant galvaudée de l՚autofiction – cet exercice de style superficiel où les grincements du Je ne parviennent guère à dissimuler la navrante gratuité du Jeu – Philippe Desjardins nous livre les doutes et souffrances d՚un narrateur anonyme. Au fil de ses 130 pages, le récit s՚achemine vers une issue qui, on le devine dès la phrase d՚ouverture, ne peut àªtre que tragique : Si au moins l՚amer de la mort m՚arrimait un minimum !...
Suit un huis-clos de 24 heures que rien ne trouble, si ce n՚est un téléphone portable — dernière laisse en date… désastreuse antidote au doute… antidote au seul… — dont la sonnerie qui n՚est autre que le riff assassin du Happy Family des Ramones, groupe rock emblématique des années 80… Autre objet récurrent, l՚ordinateur sur lequel sont visionnées quelques vidéos de concerts punks postées sur You Tube : Rien d՚autre que des déchets numériques, cadavres maintenus à la surface du temps par leurs poumons gonflés d՚inanité. Une fois mis à mal l՚étendard de la contre-culture, il semble bien qu՚il ne reste plus rien : à€ à§a que tu t՚agrippais, à des conneries braillardes… Fuck off ! Délaissant les oripeaux du punk, qu՚il avait si souvent mis en scène par le passé, Philippe Desjardins préfère désormais s՚attacher aux objets du quotidien – la description du placard à pharmacie, modèle d՚hyper-réalisme et d՚autodérision ironique constitue à lui seul un morceau d՚anthologie – afin de mieux nous placer au cœur d՚un quotidien angoissant et quasi fantastique . Avec ce nouvel opus, l՚auteur de L՚envers de l՚Enfer quitte ainsi les rivages de l՚épopée déjantée dans laquelle il excellait, pour aborder une écriture plus complexe mais toujours aussi tonique.
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