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traversée Balzac

Étude de femme

Où Balzac use d’un narrateur personnage, pratique plutà´t rare chez lui :
J’ai eu le bonheur de voir ce phénix des marquises : elle cause bien, je sais écouter, je lui ai plu, je vais à ses soirées.
Et où il en fait parfois des tonnes dans la revendication d’honnàªteté :
J’ai l’honneur de vous affirmer que tout se passa ainsi. Je n’ajoute, je ne retranche rien.
Et dans la modestie, nécessaire au rythme du récit :
nous parlà¢mes de choses indifférentes. Je ne crois pas que l’on me sache mauvais gré de supprimer notre conversation.

Où on est d’emblée et à la fois placé sur le plan de la réflexion morale et de l’illusion du réel :
On trouve toujours ce qu’on ne cherche pas. Cette phrase est trop souvent vraie pour ne pas se changer un jour en proverbe. Ce sera la moralité de cette aventure, que je ne me permettrais pas de raconter, si elle ne retentissait en ce moment dans tous les salons de Paris.

Où le narrateur n’est autre que Bianchon qui, bien avant Bardamu, voit l’humanité à nu avec l ?œil du toubib :
Moi qui la soigne et qui connais son secret, je sais qu’elle a seulement une petite crise nerveuse de laquelle elle profite pour rester chez elle.

Où il est fait le portrait de Rastignac jeune :

un jeune homme aussi modeste qu’il est étourdi, plein de bonnes qualités, et ne laissant voir que ses défauts ; il est passionné et se moque des passions ; il a du talent et le cache ; il fait le savant avec les aristocrates et fait de l’aristocratie avec les savants. Eugène de Rastignac est un de ces jeunes gens très sensés qui essaient de tout et semble tà¢ter les hommes pour savoir ce que porte l’avenir. En attendant l’à¢ge de l’ambition, il se moque de tout ; il a de la grà¢ce et de l’originalité, deux qualités rares parce qu’elles s’excluent l’une l’autre.

(où il apparaît que faire de Rastignac dès Le Père Goriot l’archétype de l’ambitieux est sans doute aller un peu vite en besogne, parce qu’il y a un à¢ge pour tout, et où la formule tà¢ter les hommes pour savoir ce que porte l’avenir pourrait àªtre une des définitions possibles de l’écriture narrative)

Où il est fait l’éloge du tisonnage (je me demande s’il y a eu une étude du rà´le des cheminées chez Balzac, apparemment, il y aurait de quoi s’amuser, rien qu’avec les lettres jetées au feu)
Oh ! tisonner quand on aime, n’est-ce pas développer matériellement sa pensée !
Oh ! avoir les pieds sur la barre polie qui réunit les deux griffons d’un garde-cendre, et penser à ses amours quand on se lève et qu’on est en robe de chambre, est chose si délicieuse, que je regrette infiniment de n’avoir ni maîtresse, ni chenets, ni robe de chambre. quand j’aurai tout cela, je ne raconterai pas mes observations, j’en profiterai.
(ou comment l’écriture est envisagée comme activité susceptible de cesser avec le confort, une nécessité dont il est difficile de s’accorder quant à ses origines, financières ou littéraires)

Où la narration tient autour d’une lettre adressée par erreur et où, de nouveau, le nom est d’importance capitale :
Si cela est, dit alors la marquise en arràªtant Eugène par un air froid et composé, il vous serait difficile de m’expliquer, monsieur, par quel hasard mon nom a pu se trouver sous votre plume. Il n’en est pas d’une adresse écrite sur une lettre comme du claque d’un voisin qu’on peut par étourderie prendre pour le sien en quittant le bal.

Où Stendhal peut rougir jusqu’aux oreilles :
Un homme d’esprit, Stendhal, a eu la bizarre idée de nommer cristallisation le travail que la pensée de la marquise fit avant, pendant et après cette soirée.
(voir aussi tout le bien que Balzac dit de Stendhal dans sa correspondance avec Mme Hanska)

Où on apprend la mort d’un personnage de la Comédie humaine en lisant le journal :
Monsieur de Listomère reprit tranquillement la lecture de son journal et dit : Ah ! madame de Mortsauf est morte : votre pauvre frère est sans doute à Clochegourde.

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