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au fil des jours

de l’ordre de la fantasmagorie et du songe

Nathanël s’émerveillait que ces gens, dont il ne savait rien un mois plus tôt, tinsent maintenant tant de place dans sa vie, jusqu’au jour où ils en sortiraient comme l’avaient fait la famille et les voisins de Greenwich, comme les camarades de bord, comme les habitants de l’île perdue, comme les commis de la Judenstraat. Pourquoi ceux-ci et non pas d’autres ? Tout se passait comme si, sur une route ne menant nulle part en particulier, on rencontrait successivement des groupes de voyageurs eux aussi ignorants de leur but et croisés seulement l’espace d’un clin d ?œil. D’autres, au contraire, vous accompagnaient un petit bout de chemin, pour disparaître sans raison au prochain tournant, volatilisés comme des ombres. On ne comprenait pas pourquoi ces gens s’imposaient à votre esprit, occupaient votre imagination, parfois même vous dévoraient le cœur, avant de s’avouer pour ce qu’ils étaient : des fantômes. De leur côté, ils en pensaient peut-être autant de vous, à supposer qu’ils fussent de nature à penser quelque chose. Tout cela était de l’ordre de la fantasmagorie et du songe.
M. Yourcenar, Un homme obscur

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